Georges Rouault !
février 27th, 2013Georges Rouault .
Ce timbre -poste de la série artistique 1971, est émis l’année du centenaire d’un des créateurs les plus originaux de ce temps. Georges Rouault (1871- 1958). Il était né dans une cave de Paris pendant la Commune et n’était pas sans voir là une prédestination à la tension tragique de son œuvre. Entré chez un restaurateur de vitraux;” la couleur, écrira t-il, grisa l’apprenti verrier.” Aux Beau Arts, il est l’élève préféré de Gustave Moreau, puis fréquente les écrivains catholiques, Huismans, le philosophe Maritain et surtout le polémiste Léon Bloy, dont il fut l’intime, sans se laisser pour cela appeler le Léon Bloy de la peinture.
Ses œuvres à la composition dramatique aux couleurs intenses, soutenues par une matière fournie, s’explique sans doute par l’expérience du peintre verrier, par l’amour de l’art roman, ascétique et hiératique. Mais l’expression est partie d’une vision toute animée d’intention morale, d’une inspiration totalement religieuse, dans la ligne du Christianisme des origines. Et son tempérament spontané, sa rude bonté, sa franchise de cœur, lui font trouver les chemins de l’expressionnisme le plus direct.
A côté des sujets bibliques, sa vision se nourrit du spectacle de la société de son temps, dans les êtres qui en constituent la frange, la plus marquée, les familiers des tribunaux, le monde du cirque. Réagissant ainsi contre l’optimisme de la Belle Epoque, il grave à gros traits la déchéance, l’angoisse de l’humanité. S’il proteste qu’il “n’a jamais voulu le scandale, ni désiré choquer autrui”, ses noirs accentués, ses couleurs profondes usent des prolongements émotifs de la sensation pour troubler les quiétudes béates et provoquer à la méditation essentielle.
Cette tête de clown achevée en 1946, qui est au Musée national d’Art moderne, est intitulé “Songe creux” . Rouault, d’après ses intimes, “ne donnait un titre à ses peintures qu’après les avoir achevées”: c’est donc une indication précieuse sur l’intention finale de l’œuvre. Ce masque fascinant, énigmatique, semble suivre une chimère, se posait vaguement une question, fixer le néant, penser à vide. Le peintre nous tend -il une sorte de miroir, où nous sommes confrontés avec notre vaine image, notre hébétude, notre incapacité à nous poser seulement les vraies questions ?
Cette sincérité Rouault l’a eu envers lui-même” J’ai vu clairement écrit-il au critique Edouard Schuré, que le pitre s’était moi, c’était nous…. cet habit riche et pailleté, c’est la vie qui nous le donne. Mais si l’on nous surprend comme j’ai surpris le pitre, qui osera dire qu’il n’est pas pris jusqu’au fond des entrailles d’une incommensurable pitié ? J’ai le défaut de ne laisser à personne son habit pailleté: l’homme que j’ai devant moi, c’est son âme que je veux voir; et plus il est grand, plus je crains pour son âme…..”
Timbre dessiné et gravé par Robert Cami. Format vertical 14 x 53mm. Vente anticipée le 5 juin 1971 à Paris et vente générale le 7 du même mois. Retiré de la vente le 08/09, 1972.
Source: Catalogue CEF. Feuillet tiré à 21 750 exemplaires dont: 500 en Anglais, 550 en Italien 700 en Allemand et 500 en Espagnol. Illustré par “L’apprenti-ouvrier”, ci -dessous: