Roulante
novembre 26th, 2006
Dernière manœuvre, celle que nous appelions : La manœuvre des « quillards ».
8 jours avant cette manœuvre, où tous ceux que nous appelions « les planqués » (souvent faux d’ailleurs), reprenaient du service « actif » pour la dernière fois, avant la démobilisation, auprès des canons, le capitaine réunit tous les sous-offs appelés. Comme j’avais été de toutes les manœuvres comme chef de pièce, je m’attendais avec joie, à rester à la caserne.
Et bien, que nenni ! Après avoir affecter, les MDL « secrétaires, fourriers et autres sous-offs d’ordonnances aux pièces, désigner ceux qui resteraient au casernement, il se tourne vers moi, et me dit : « pour vous, ce sera « l’ordinaire, », terme qui en militaire veut tout simplement dire « la bouffe », soit en campagne : la « roulante ». Inutile de vous dire que j’étais passablement déçu. A avoir voulu, pour une fois la planque, me voilà gros Jean comme devant.
Le jour venu, je me trouve en queue du convoi, avec une jeep et un JMC qui tractait cette satanée roulante (C’est ce modèle, mais elle,…..elle sort du net) Je vous épargnerais ces deux semaines, passer à couper le bois pour cette dévoreuse, à aller chercher le ravitaillement (pain, eau, etc) puis le midi, à aller livrer le repas, à l’emplacement qui m’avait était spécifié la veille. Je n’avais pas besoin de m’occuper du repas, les cuistots connaissaient très bien leur travail. Le soir : Idem.
La veille du retour de Mailly le Camp, le capitaine, m’envoie faire le plein des jerricans pour le retour à la caserne à Thionville. Lorsque nous sommes revenus assez tard, et faire le plein des réservoirs de ces monstres que sont ces Mack, il était minuit passé, et nous devions partir, à 4 heures du matin, avant le convoi, pour s’arrêter en cours de route et pouvoir servir un repas chaud à tous.
Je m’aperçois que les carnets de bord des véhicules ne sont pas signés. Le matin, à 4 heures, toujours pas d’officiers en vue, alors je prends ma plus belle écriture, et remplis l’ordre de mission, en signant ainsi : Pour le capitaine « untel » le MDL Z…….. Et nous prenons la route. Arriver à la sortie de Verdun, il y a la côte « d’Etain », « en vérité, je crois que c’est la côte St Michel », mais presque tous les verdunois l’appèlent ainsi et tout en haut, à main gauche, se trouver un ancien camp américain. Le terrain était encore aménagé d’une partie macadamisée (genre de route à l’intérieur du camp.) C’est donc là, que je décidais d’installer, le « réfectoire ». L’avantage étant que « cette rue » avait une entrée et une sortie traversant tout le terrain. Sacrée aubaine pour faire stationner un convoi militaire.
Pendant que les cuistots préparaient le repas, je suis allé voir mes parents, oncles et tantes, et suis revenu avec quelques bouteilles de mirabelles et de quetsche.
Quand le convoi est arrivé, le « pitaine » me dit : « vous avez trouvé un excellent coin, nous ne gênons en aucune façon la circulation » -« Mon capitaine, je suis natif d’ici,et ça ne fait que 4 ans que j’en suis parti »-« Vous avez encore de la famille,ici ? »-« Oui, mes parents, oncles et tantes. »- « Et vous n’êtes pas….non ça va, pas de question, dégagez ! » Comme je n’aime pas trop la quetsche, j’ai versé les deux bouteilles, dans le jus de chaussettes qui avait le nom de café. Servi à tout le monde. Il était pas bien fort, juste un petit goût à part. je vais voir le capitaine, et lui demande la permission de partir tout de suite, afin de remettre à l’ordinaire de la caserne le restant des provisions que je possédais, avant le repas du soir. Je lui tends donc les deux carnets de bord en lui demandant de les signer et lui, voyant ce que j’y avais écrit de me dire : « vous êtes gonflé, signer à ma place…si vous aviez eu un accident, je ne vous couvrais pas. » Puis au moment où je dégage, il me demande ce qu’il y a dans le café. Je lui réponds : de la quetsche ! Il me regarde, par en dessous et me dit : « Vous venez de répondre à la question que j’ai évité de vous poser. Où voulez vous encore passer sur votre route ». « Juste déposer les autres bouteilles chez moi, mon capitaine ».-« Attention, pas de pépins sur la route.»
Ce fut mes dernières manœuvres, où je me suis royalement emmerdé, pendant plus de 15 jours !