Usine de Thionville.
décembre 10th, 2006Comment devient on sidérurgiste.( Sur la photo, ce sont les haut-fourneaux)
Quelques temps avant mon « renvoi dans mes foyers », ma belle-mère de l’époque, me « tannait »pour que je rentre à l’usine. Tous ses voisins y travaillaient et tous lui disaient qu’il m’était facile d’y entrer. De plus, son « patron » le docteur de l’usine, le lui conseillait aussi. Pour un gars qui roulait sa bosse depuis l’âge de 17 ans, c’était pas tellement mon credo, mais compte tenu que ma femme attendait un enfant, j’ai sauté le « Rubicon » (Il y avait juste la Fensch, petit ruisseau qui séparait la cité de l’usine.) De chez nous, nous voyons les convois de scories, encore en fusion, se déverser sur le crassier.
Je me présente donc au service du personnel, déjà averti de ma venue par cet adorable toubib. Après avoir rempli le questionnaire d’embauche avec mon cursus scolaire et de compagnon avant mon service militaire, ils me font passer des tests. Pas bien difficile, car que demande t’on à un ouvrier, en usine. Juste d’exercer le travail qu’on lui demande. Ensuite, on me dit : « Allez vous présenter au contremaître du service fumisterie, tout de suite, nous allons le prévenir. »
Dix minutes après (je me déplace en Terrot 125 : vous verrez par la suite sa grande utilité), je me présente devant ce contremaître, (assez carré : tant de carrure que de caractère,) qui me dit : « Demain matin, venez à 6 heures et je vous ferai passer votre pièce d’essai. Nous vous fournirons les outils, mais si vous en avez qui vous conviennent mieux, vous pouvez les utiliser » Le lendemain, j’arrive avec ma caisse à outils. Dès que je l’ai ouverte, il y a jeté les yeux sans un mot. Et il m’a dit : « voici un plan, et à côté de vous, tous les matériaux qui vous sont utiles pour exécuter ce travail. Les scies « clipper » (scie circulaire avec disque abrasif pour scier les briques ou pierres), ne vous sont pas autorisées. Vous exécutez toute la taille à la main. Mais je vois que, pour cet exercice, vous êtes bien outillé. Vous devez avoir fini pour 14 heures.)
A 14h 15, il est venu, mais il savait que j’avais fini depuis une bonne demi-heure, et que je papotais avec les 2 ou 3 compagnons âgés qui travaillaient à l’atelier. Il a tout contrôlé : « mesures, épaisseur des joints (2mm), aplomb, et surtout la taille des sommiers et des briques de voûte. (Voûte plein cintre). « C’est d’accord, vous êtes embauché en tant que P1 (ouvrier-professionnel 1er échelon), dans 2 ans vous pourrez passer l’épreuve de « P2 ». Vous commencez lundi prochain en poste du matin. Demain, vous allez passer la visite médicale d’embauche, inutile que je vous dise où aller, vous connaissez très bien. (Décidemment !)
Voilà comment d’oiseau vagabond, je suis devenu un pigeon sédentaire !