
Creissels., originally uploaded by patriarch38.
Voici, ci-dessus, notre ami Yvon devant son auberge, avec son ami. La femme à côté, est Carmen, l’une de mes amis Calédoniens. J’en parlerai plus tard.
Donc, après notre premier repas de midi, (plat du jour) nous retournons sur le chantier. Le client nous donne le bordereau qu’il a reçu avec les matériaux, nous contrôlons et lui demandons les plans du four. Il nous les remets en nous disant : « Il y a deux contrôleurs de la maison Carborundum, qui arrivent ce soir, pour vous indiquer la façon de procéder. » Carborundum étant la firme qui fournissait les matériaux. Avec le plan, nous aurions pu commencer, mais à quoi bon chercher l’affrontement dès le départ. Nous avons profité, de l’attente, pour visiter cette usine qui avait encore des vieux fours à alandiers, en compagnie du jeune patron.
Vers les 18 heures arrivent les VRP. Costard, cravate et escarpin, de vraies gravures de mode. Un couple, un peu comme Laurel et Hardy. Laurel, un jeunot à la mine effacé et Hardy, presque aussi large que haut. (J’avoue que là, j’étais battu.) Devant ces figures de catalogue, le patron, leurs a indiqué plusieurs hôtels de Millau et aussi le château. Ils ont en cœur (bien que ce soit Hardy qui tenait le crachoir) choisi le château de Creissels.
Le lendemain matin, nous avions attaqué la pose des studs par soudure, avant qu’ils n’arrivent. Ils ont commencé à se pencher sur les plans avant de venir nous dire (toujours le même porte-parole) : « nous voyons que vous avez compris comment officier. » Et puis, ils nous ont fichu la paix, tout en restant continuellement dans nos pattes. Quand le petit chaperon rouge est arrivé avec notre casse- dalle, j’ai remarqué qu’Hardy avait un regard concupiscent en voyant l’étal se garnir. (Manger, c’est aussi un plaisir, donc on peut regarder la bouffe avec concupiscence).
Le soir, Yvon nous avait concocté un repas digne de nous (ben oui !!). Après les hors- d’œuvres, une truite farcie et des pommes de terres rissolées. Plateau de fromage et glace comme dessert. Par la suite, tous les soirs, c’étaient des repas de ce genre. Parfois, sa femme et sa fille, venaient partager notre repas, et lui aussi quand il le pouvait.
Vous commencez à me connaître et savez que j’ai une bonne âme, alors, tous les matins, je décrivais jusqu’au moindre détail notre repas du soir. J’avais parié qu’au bout d’une semaine, les châtelains allaient demander de venir partager notre ragoût prolétarien. Le troisième jour, le jeune patron, s’est aussi mis de la partie, en me questionnant sur le menu du soir, j’avais ainsi moins le rôle du diable tentateur. Et moi, d’énumérer, avec emphase, les petits plats : écrevisses, Ris de veau au Sauternes et au foie gras, omelettes aux langoustines, civet de cochon de lait, etc.. Le tout accompagnait toujours d’une bonne bouteille. Vous auriez du voir Hardy, il en devenait écarlate, si bien que j’ai un peu moins appuyé sur la chanterelle. Je voulais l’appâter et pas être obligé de lui faire du …… bouche à bouche, pour le ranimer.
Et puis, il a craqué en disant : « tu crois qu’Yvon nous ferait aussi un bon repas un soir ? » -« Tu lui demandes demain matin quand il nous apporte notre casse-croûte. » (Eux, ils petit -déjeunaient au Château). « Je préférerai que tu le lui demandes. »-« Demain soir, ça va ? »-« Oui, bien sûr, on décommandera à l’hôtel. » Yvon, qui avait aussi remarqué son comportement lors des casses- croûtes, fût d’accord et il a sorti les grands plats. Ecrevisses, truite aux amandes, avec courgettes en gratin, plateaux de fromages, puis, île flottante. Et comme liquide : du Gaillac bien sûr. Laurel et Hardy d’un côté et de l’autre……… maintenant, je suis en train de penser que les gens qui nous voyaient, Castor et moi, pouvaient aussi nous appeler ainsi. Castor un gringalet et moi….bien en forme. Disons que les Hardy se faisaient face, comme les Laurel.
Pour la première fois de ma vie, j’ai vu ce qu’était un gourmand- gourmet. Il faisait face à la porte de la cuisine, et rien qu’en le regardant je savais qu’Yvon apportait la suite. Ses yeux s’illuminaient, sa face se couperosée et croyez moi, si au début du repas, il salivait ; au 2ème plat il bavait, un peu comme un St Bernard devant un os. Yvon lui, me faisait comprendre par mimiques, qu’il n’avait jamais vu ça. Bons bougres, l’un comme l’autre, voulaient se partager l’addition. Mais Yvon ne leurs a fait payer que leur part, arguant que nous étions pensionnaires chez lui et que c’était compris dans le prix de pension. Laurel m’a alors demandé « combien payez vous par jour ? » Après ma réponse, il m’a dit : «ça ne couvre même pas le prix de notre chambre. » Quand nous sommes sortis de chez Yvon, je leurs ai dit : « Regardez la façade, elle ne paye pas de mine, mais l’intérieur est divin. Eh oui, que voulez vous, la façade …….. c’est de l’attrape- couillons. »
La suite à dimanche prochain.