Les tribulations……..suite.
Je suis resté 3 semaines à Lanester, car après ce four, j’ai eu le droit d’en faire un second. Le soir de ma dernière débauche, le directeur de la boite est venue me voir, me disant qu’il était content de mon travail et patati et ….patata. « En conséquence, nous ferons sûrement de nouveau appel à vous. Tenez, voici une lettre à remettre à votre patron. »
Avant de partir, je téléphone au bureau d’où le patron me confirme, qu’il me donnait comme convenu, la semaine à venir, pour aller visiter les boites où j’ai travaillé précédemment, près de chez moi et me fixant rendez vous au bureau, pour le vendredi après midi. J’ai donc passé une semaine à visiter ces sociétés, 5 sur Grenoble et 3 en dehors de la ville. Le vendredi, comme convenu, je passe au bureau, après les salutations d’usage : « Voici les documents, sur lesquels sont inscrites les sociétés où je suis allé, ainsi que les noms des personnes à contacter. Ces personnes attendent vos offres de services chiffrées. Voici aussi quelques copies de facturations pratiquées par mon ancien patron. » Il a tout, de suite, regardé ces factures en me demandant : « Ce sont les chiffres exacts du prix facturé pour l’heure travaillée et les frais de déplacement ? »-« Oui bien sûr ! »-« Alors pour moi, c’est du pain béni. Dès demain, j’envoie mes propositions à toutes ces sociétés. Vous voulez savoir ce qu’il y a dans l’enveloppe que vous m’avez apporté, de Lanester ? » -« Non ! »
« Lundi, vous partez chez BSN (Verrerie) à Puy Guillaume. Je vais vous présenter un jeune compagnon, qui vous prendra lundi matin à 5.heures. Comme il habite du côté de Varces, ça ne lui fait aucun détour. D’ailleurs, il va vous ramener chez vous. D’autre part, le chef de chantier à Puy Guillaume est Roger T que vous connaissez depuis quelques années je crois. Vous n’avez pas besoin, d’argent ? »-« Non, les acomptes que je perçois tous les vendredis me suffisent, du moment qu’ils couvrent mes frais. (Déplacements et frais de route). Nous passons au secrétariat où je perçois mes acomptes de la semaine passée, et où il me présente Alfred B, un gaillard de 1 mètre 85 et + de 100 kilos bien tassés. Etant aussi de descendance rital, nous avons tout de suite sympathisé.
Le lundi 5 heures, Alfred passe me prendre et nous avons fait plus ample connaissance durant le trajet. En arrivant, sur le chantier, Roger T me dit : « j’ai été prévenu que tu venais et je t’ai réservé une piaule à l’hôtel où je suis. Je vais te mettre au feeder. Tu auras moins à te casser les reins. »-« Comme tu veux ! » Le soir, à la pension, il m’a présenté son fils qui était aussi dans le métier, nous parlions des compagnons que nous connaissions tous les deux. Pour qui, ils travaillaient, ceux qui avaient fait le saut ; de tout et de rien. Et il me dit : « Tu sais que j’étais dans son bureau quand tu as téléphoné, il m’a demandé si je te connaissais, car tu demandais de l’embauche. J’ai rigolé et je lui ai dit : tête de cochon, bon compagnon et tu peux compter dessus. Mais s’il te dit non, n’insiste pas, il n’a pas de voiture et ne connaît pas la marche arrière, chez F & V, il était chef de chantier. »
Ce sont de bons moments, même si on parle des absents, de leurs blagues, de bonnes cuites que certains prenaient. (Un jour, nous avions surélevé la 4 chevaux, d’un de nos compagnons, juste de façon à ce que les roues ne touchent pas l’asphalte. Inutile de vous dire que les gars étaient planqués et assistaient au spectacle. Il a fallu 10 bonnes minutes, avant que les deux frères (des jumeaux) comprennent le tour que nous leurs avions fait. Une autres fois, en plein hiver à Béthune, à l’heure d’embauche des employés, nous avions parié de faire le tour de l’usine, torse nu et en slip. Nous n’avons été que deux à le faire, par 10cm de neige c’est vivifiant. (Rires !!) Vous savez, la vie de compagnons n’est jamais triste, même sur les chantiers où parfois on en bave, il y a toujours un plaisantin pour lancer une vanne et parfois quand c’est parti, c’est bien parti. (Ceci est un aparté !!!!)
Le jeudi soir, Roger me dit : « Ce soir tu ne retiens pas ta chambre pour lundi, car lundi matin, tu dois aller à Infra-four à Grenoble. Le boss était étonné que déjà la boite te demande. Une semaine après ton passage et le surlendemain qu’il ait envoyé ses offres de travail. Tu peux faire ton trou là, si tu veux, tu sais le boss, c’est un ancien compagnon, moi, je l’ai connu comme compagnon et il y en a plusieurs, à la boite, qui sont dans ce cas. »-« Non, je ne veux plus de responsabilité, les bons compagnons disparaissent tous. Maintenant, je veux vivre ! Tu comprends ce que je veux dire. Vivre, sans avoir à te casser le mou, tous les jours pour ceci ou cela. Si j’ai envie de dire à un gars que c’est un con, je vais pouvoir le faire, toi en temps que chef de chantier, tu dois filtrer la moindre de tes paroles. Les 20 ans qui me restent à faire, je veux les faire en roue libre. Ne t’en fais pas, je suis heureux ainsi. Il est d’ailleurs temps qu’enfin je pense un peu à moi !! » Lui, il y a plus de 25 ans, qu’il a levé le pied définitivement !
A dimanche prochain pour la suite.